Une expression galvaudée prétend que "la sécurité est la première des libertés". Il convient de souligner qu'il s'agit là d'un non-sens. En effet, la sécurité n'est pas une liberté. Elle a d'ailleurs été qualifiée d' "objectif constitutionnel" par le Conseil constitutionnel. Liberté et sécurité entretiennent des rapports dialectiques dont la synthèse est faite de sacrifices réciproques. La confusion vient de la fausse interprétation du terme "sûreté" qui figure à l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 (où il est exprimé que "les droits naturels et imprescriptibles de l'homme" sont "la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l'oppression"). La sûreté est envisagée sous l'angle de la protection (notamment par des règles de droit pénal et de procédure pénale édictées par le législateur, en réaction contre les lettres de cachet et les lettres d'abolition de procédure de l'Ancien Régime) du citoyen contre l'arbitraire du pouvoir. Il est bien évident que la préoccupation des rédacteurs de la Déclaration n'était pas la sécurité (au sens actuel du terme) ! Dire cela n'est pas minorer l'importance de la sécurité. Le premier devoir de l'Etat est sans doute d'assurer la sécurité des personnes et des biens. Le Contrat social dont parle Rousseau n'est-il d'ailleurs pas l'échange d'une liberté contre la sécurité. Il s'agit simplement de ne pas tomber dans le piège du langage sécuritaire qui finalement conduit à cette pente dangereuse des restrictions toujours plus nombreuses portées aux droits et libertés sous prétexte de sécurité, au risque d'ailleurs de faire perdre à la peine son véritable sens. A trop étendre son domaine, la peine a perdu de sa force. Et tout cela a pour conséquence le (piètre) résultat que l'on constate. Face à l'échec de cette politique sécuritaire, une autre politique est possible. Mais cela est un autre débat.
Patrick CANIN
Président de la section de Valence de la Ligue des droits de l'homme, Maître de conférences à la faculté de droit de Valence.
Patrick CANIN
Président de la section de Valence de la Ligue des droits de l'homme, Maître de conférences à la faculté de droit de Valence.